Le Monde des brevets logiciels

Mar 08 mars 2005

Depuis que les brevets logiciels ont été adoptés par le Conseil Européen (on a encore quelques recours, notamment dûs à la méthode de passage de la directive, mais on peut également espérer un passage en seconde lecture au parlement plus que houleux), la blogosphère est tout en émoi.
Les programmeurs savent de quoi il retourne quand on parle de brevets logiciels. C'est peut-être le moment d'expliquer aux autres à quel point le principe de brevetabilité des logiciels est un danger pour l'ensemble de l'économie liée aux nouvelles technologies.

Voici quelques minutes de mon temps. Quelques minutes d'une session sur un micro-ordinateur qui pourrait être le tien, à peu de choses près. Oh ! Même s'il y avait quelques variantes, ça doit théoriquement être la tienne. Il faut que tu imagines que ce soit la tienne.

J'ai ouvert une session sur mon PC portable, et j'exécute le programme Firefox. C'est mon navigateur favori, j'ai même associé une touche sur mon clavier. En fait, c'est la touche "Windows", pour tout dire. Dans la barre d'adresse, je table slashdot.org, puis entrée. Je zieute les infos. Une actualité retient mon attention : Companies Claim iTMS, iPod Patent Infringement. En gros, une société, appelée Pat-rights, attaque Apple en raison de la violation d'un de leurs brevets : 'Internet User Identity Verification'. Ce brevet concerne l'identification d'un utilisateur sur internet.
Inquiétant. Très inquiétant.
L'iTune Music Store est évidemment sécurisé, par un genre login / mot de passe, pour permettre aux clients d'acheter des morceaux de musique et de les télécharger. L'identification est obligatoire, pour éviter qu'on achète les morceaux sur les comptes de quelqu'un d'autre. Ca me plairait pas qu'on débite mon compte en banque sans que je puisse y faire quoi que ce soit. Pat-rights demande 12% sur les ventes réalisées par iTunes.

Ensuite, je file vers ma boîte mail yahoo[*]. Je m'identifie... Je constate qu'on ne m'a pas écrit, bon, ok. Puis je me connecte sur Newsgator, qui m'identifie par un cookie[*]. Ca me permet d'accéder à tous mes fils RSS, rangés dans les dossiers que j'ai déterminé, et de lire les nouveaux items arrivés. Pfiou ! Plus de cinquante. Allez, je vais lire ça et je reviens.
Entre temps, j'ai lancé Thunderbird, mon client de mail, qui se connecte aux comptes POP[*] de roller-euskalherrian.com, tele2.fr et jehaisleprintemps.net en utilisant un login et un mot de passe qui me sont propres. J'entends un petit "bip". Ah ! un mail sur JHLP. Ca se passe sur la liste de diffusion de Ubtuntu-fr. Je lis en diagonale. Pas concerné.
Une fois ma lecture sur Newsgator terminé, je vais faire un tour sur les forums de Lugradio. Grâce à un autre cookie, j'accède seulement aux nouveaux messages ; il y en a beaucoup, depuis quelques temps. Rien à dire à la foule, ce coup-ci, mais si j'avais voulu le faire, je l'aurait fait sous le pseudo qui était le mien il y a un an : No'[*].
Un appel du boulot ! Argh ! Y'a un problème sur le serveur dédié qu'on utilise au taf. Je lance une console sur mon bureau, je me connecte au serveur via SSH[*], et je résouds le soucis en deux lignes de commande. Ok, tout va bien. C'est royal, SSH. On peut administrer à distance n'importe quelle machine comme si on était en face de l'unité centrale.

Ouais. C'est bien internet...
On peut faire ce qu'on veut. Pour l'instant. Tu as dû le remarquer. J'ai laissé traîner quelques astérisques ça et là. A chaque fois, c'est quand j'utilise un procédé qui a été breveté par ces enfoirés de Pat-Rights : l'identification sur internet. Si les brevets logiciels entraient en application, aucun de ces services que l'internet me rend seraient disponibles, parce que très vraisemblablement, à part quelques géants des réseaux qui seraient capables de payer les amendes pour infraction, aucun de ces fournisseurs de service ne pourrait m'y donner accès.
Ne parlons même pas des programmes libres, développés avec un minimum de fonds destinés à payer essentiellement les espaces disques, la bande passante, et qui rémunère rarement ses développeurs. Apache, par exemple, le serveur Web le plus répandu dans le monde, qui héberge Je Hais Le Printemps, ainsi que plus de 65% des sites internet de la toile. J'apprécie d'ailleurs tout particulièrement la possibilité que me laisse Apache de protéger mon module de gestion, celui-là même qui me permet de taper l'article que tu es en train de lire. Ca me permet d'en maîtriser le contenu, d'être sûr que personne d'autre que moi ne rédige ces conneries, de modérer les commentaires si besoin est... Bref, d'administrer mon site. Heureusement, un fichier .htaccess interdit l'accès à toute personne non-autorisée[*].

Pour en savoir plus, d'une autre manière :